En permanence sur les routes, NINE ELEVEN passe une fois de plus par la ville aux cent clochers pour le début d'un mini-tour pour le pont de l’Ascension. L’événement est organisé par Emergence Records, éminent label rouennais actif depuis plus de 15 ans, et c’est au 3 Pièces, dont la cave a été remise aux normes récemment, avec les nouvelles formations locales FONDATIONS et URAKEN.
Quand on jette un coup d’œil dans le rétroviseur, NINE ELEVEN a déjà laissé d’excellents souvenirs à Rouen. En 2010, le carrelage du Highland Café (désormais La Taverne de Thor) avait subi le joug de leur modern punk hardcore ultra énergique, en compagnie de leurs frères d‘arme de FAKE OFF. En 2011, c’est le Bateau Ivre qui avait subi le même sort, à l’occasion d’une date avec (entre autre) LAZARE. C’était d’ailleurs un des derniers concerts dans ce haut lieu de la scène underground rouennaise, avant sa fermeture quelques mois plus tard. Après l’incroyable City Of Quartz (2009), NINE ELEVEN a enchaîné avec l’excellent Le Rêve de Cassandre en 2012, puis a commencé un virage post-hardcore avec 24 Years (2013), dissipant quelque peu son énergie. Aujourd’hui, le groupe défend Sentinels, un concept-album sorti en septembre 2016 qui comporte une unique piste de 33 minutes. Cette date est donc l’occasion de découvrir ce nouvel effort et de voir comment le groupe a évolué depuis 2011.
‡ FONDATIONS
Décidément, la scène rouennaise est plus prolifique que jamais. Avec des membres de TOBOGGAN et de THE BIRDS ENDS, FONDATIONS fait dans le post-hardcore à deux basses. La première surprise, c’est leurs positions dans la cave : le public se retrouve pris en sandwich avec d’un côté la guitare, la batterie, un écran et les amplis, et de l’autre les deux bassistes (dont le chant). La disposition étant peu ordinaire, on a tendance à chercher un peu sa place en tant que spectateur, et on perd nécessairement une partie du show. Simple mise en scène ou réel intérêt sonore ? Dans tous les cas, force est de constater que le son est absolument nickel, et c’est suffisamment rare au 3 Pièces pour que ça soit réellement souligné. Les amplis Orange crachent un son lourd et ultra progressif, avec un jeu de batterie super intéressant. Le post-hardcore de FONDATIONS est plutôt aérien, mais certains passages sont plus rapides et frôlent le screamo. Globalement, c’est très travaillé, et c’est une bien bonne surprise. En complément de la disposition peu commune de la salle, le visuel est agrémenté d’un écran qui intercale les mots « COLÈRE », « MÉLANCOLIE », « PEUR », « REMORDS » et « EXTASE » entre chacun des titres. De quoi donner une idée des sensations qu’évoque la musique du combo.
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‡ URAKEN
Du punk hardcore ultra old school qui lorgne avec le powerviolence sur fond de d-beat fastcore/fastpunk. C’est rapide (1 minutes par morceau), expéditif (20 minutes de show) et sans aucune fioriture. Ceux qui aiment l’esprit punk US contestataire des 80’s sont ravis et arpentent la cave du 3 Pièces les 4 fers en l’air. Pour les autres, difficile de rentrer dans le délire. La première démo d'URAKEN est disponible depuis le 24 mai sur leur Bandcamp.
‡ NINE ELEVEN
S’il y a bien une chose qu’on ne peut pas retirer à NINE ELEVEN, c’est bien son esprit DIY. Donnez-leur un créneau entre 4 murs et ils sont d’équerre pour traverser la France et faire un show. Les balances sont plutôt expéditives et ce qui semble ne marcher qu’à moitié sur le coup devrait quand même marcher en temps voulu. Sauf que résultat : le son est très fort, les samples sont encore plus forts et les micros fonctionnent une fois sur deux. Pour la setlist, c’est donc parti pour 30 minutes de « Sentinels ». Découvrir le virage à 90° du combo vers le post-hardcore ultra progressif est pour le moins assez déroutant quand on s’attend à écouter les titres punchy à l’origine des premiers amours du groupe. Avec un morceau aussi long, on comprend vite que chacun des riffs doit être poncé jusqu’à la moelle avant de passer au suivant et que comme c’est globalement cohérent, il y a quelque thèmes qui reviennent régulièrement. Le côté progressif est du coup un peu poussif et ça a parfois du mal à décoller. Mais ce qui frappe le plus, ce sont les samples qui agrémentent cette chevauchée fantastique inattendue. Pour aller encore plus loin dans le côté épique du morceau-concept, NINE ELEVEN a rajouté, entre autre, un certain nombre de partie de violon. Sur le principe, pourquoi pas, mais quand les samples surpassent largement tout le reste de la musique, on se croirait presque à un concert d’APOCALYPTICA. La comparaison est poussée à l’extrême (c’est pour la blague), mais l’idée est là. Malgré un énième changement de line-up, on retrouve tout de même cette passion qui anime les musiciens de NINE ELEVEN, que ça soit en s’exécutant à l’ouvrage ou en s’acoquinant au micro qui fonctionne le plus proche. Au final, NINE ELEVEN poursuit aujourd’hui ce qu’il a entamé avec 24 Years et pousse encore plus les limites d’un post-hardcore mélodico-progressif. Fallait juste se tenir au courant, en fait.
