MONOLORD + MHÖNOS + DOG AND PONY SHOW | Le Havre | 19 mai 2018

mardi 22 mai 2018


Pour la seconde année consécutive, Vermin Lord Shows fait venir MONOLORD en terre havraise à l’occasion de leur tournée européenne. Seule date française du tour, c’est au CEM du Fort de Tourneville que la messe opère, en compagnie des Rouennais de MHÖNOS (ritual doom) et des Havrais de DOG AND PONY SHOW (noise sludge). Ces derniers remplacent leurs confrères de FACIAL (grind/punk), qui ont été contraints d’annuler leur venue en dernière minute. Pour l'occasion, le studio de création graphique Imaginoscope signe une magnifique affiche dont la version brillante est une merveille.

Ypres (Belgique), août 2015 : MONOLORD déboule dans une chaleur étouffante sous le chapiteau du Ieperfest. En 35 minutes de show, le combo m’a littéralement scotché sur place, la magie du chant psychédélique et la profondeur des riffs opérant de manière impeccable. La toile de la Marquee doit encore trembler aujourd’hui de ce passage pachydermique, et bon nombre de festivaliers sont sortis de la tente en tant que nouveaux adeptes de la formation suédoise. Aujourd’hui, le groupe défend le successeur de l’excellent Vaenir sorti en 2015 chez Riding Easy Records, chez qui on retrouve également le duo allemand THE PICTUREBOOKS. Datant de l’année dernière, Rust m’a un peu déçu car relativement en dessous de ce que le trio avait proposé précédemment. Mais face à la déferlante qui avait opérée sous le soleil belge, difficile de passer à côté du vrombissement suédois en terres normandes.

‡ DOG AND PONY SHOW
Y’a pas à dire, le sludge noisy du duo havrais avoine sec ! Les compositions sont propres, c’est énergique, et ça donne un bon coup de pied dans la fourmilière. On pense à un EYEHATEGOD plus mathématique avec un son punk/grunge sur certains morceaux (qui évoque les riot girls de L7). Muni d’un masque à gaz, le chant du batteur renforce ce côté artisanal low-fi vachement bien foutu et fort heureusement, le côté noise ne prend pas le dessus sur le propos de DOG AND PONY SHOW. Le titre « Tijuana Airport » propose en plus un question/réponse entre la guitare et la batterie fort à propos, qui n‘est pas sans rappeler - dans un autre registre - la complicité du duo allemand MANTAR (dont le live report de leur show à Berlin en avril 2017 est à lire ici). En bref, une bonne découverte locale pas piquée des vers.

DOG AND PONY SHOW : Facebook

Photographie d'Antonia Enos (Live For The Show) pour le CEM : Tumblr / Facebook

‡ MHÖNOS
Dans un tout autre registre, le son de MHÖNOS est une épreuve live qui pousse l’auditoire dans ses derniers retranchements. Composé de trois basses, de deux percussionnistes et d’un vocaliste, le combo rouennais fait dans le doom funéraire et rituel à tendance expérimentale. Monolithique de bout en bout avec leurs compositions de 10 minutes, le groupe présente ici son album LXXXVII sorti en décembre 2017 chez Dead Seed Productions et Zanjeer Zani Productions. Autant dire qu’il faut rudement s’accrocher pour s’immerger complétement dans cette messe funèbre où les expérimentations bruitistes sont légions. Avec son œuvre ouvertement dérangeante, MHÖNOS s’adresse de fait à un public averti et en recherche de sensations live inhabituelles. Étant donné la présence des 3 basses, on aurait pu s’attendre à plus de rudesse du côté des basses fréquences, mais ce sont finalement les parasites bruitistes et les toms basses qui ressortent le plus. Quant au chant, il est black metal dans le style et incroyablement macabre dans la forme, rappelant certaines frasques d’Attila Csihar (MAYHEM) dans Ordo Ad Chaos (Season Of Mist, 2007). Pour ma part, l'ensemble ne me parle pas vraiment.

MHÖNOS : Bandcamp | Facebook

Photographie d'Antonia Enos (Live For The Show) pour le CEM : Tumblr / Facebook


‡ MONOLORD
Le trio suédois ouvre le set avec l’opening de Rust : « Where Death Meets The Sea ». L’étouffante lourdeur du combo est au rendez-vous et l’omniprésence du matériel Orange fait cruellement bien son taff. Le chant stellaire de Thomas V. Jäger (guitare/chant) amorce dès lors le voyage cosmique qui s’intensifie instantanément dès les premières notes de « Lord Of Suffering ». Sorti en 2016 au format 7" chez Riding Easy Records, ce titre est une petite pépite qui permet à Mika Häkki (basse) de narguer le public à grand coup de manche. C’est également l’occasion de prendre une première fois l’audience à contre-pied en feintant la fin du morceau pour finalement remettre le riff à grand coup de masse derrière la tête. Le titre qui suit, « Forgotten Lands » (Rust), est à mon sens la seule faute de ce set. Aussi hypnotique que soit ce morceau, la qualité du riff principal est bien en deçà de ce que le trio sait offrir. La rythmique basse/batterie de la seconde partie fait quand même son petit effet (le frappeur Esben Willems est impeccable), ainsi que le solo fuzzy à souhait de Thomas V. Jäger. Néanmoins, la longueur du titre (12 minutes) ampute le show des morceaux de l’excellent Vaenir, dont aucun ne sera joué ce soir (pas même « Cursing The One » !). La claque du concert s’appelle « Wormland », le titre instrumental incroyablement mélancolique à côté duquel je suis passé lors de mes premières écoutes de Rust. L’effet live produit est absolument saisissant tant la charge émotionnelle est intense. Une odyssée incroyable qui nous emmène des profondeurs abyssales aux étendues astrales. Après ce voyage hors du temps, le sample de synthé amorce le morceau éponyme « Rust ». Bien que le couplet soit plutôt bon, le titre manque légèrement de profondeur, même avec le solo typé stoner qui le clôture. Le point d’orgue du show est bien évident marqué par le grand final « Empress Rising » (Empress Rising, 2014), qui génère de manière instantanée un pic d’adrénaline auprès du public. Le riff est pachydermique et le chant psychédélique à souhait. Structurellement, c'est une bombe à retardement qui prend sans cesse l’auditeur par surprise pour l’enfermer dans son atmosphère fumeuse. MONOLORD gère habilement les 12 minutes du morceau avec des pieds de nez qui esquivent la fin du show. Thomas V. Jäger chauffe le CEM pendant une de ces accalmies avant de se fondre dans le public pour une dernière envolée psychédélique. En fait, les Suédois maîtrisent tellement ce titre qu’il en deviendrait presque trop court. La petite heure de set prend donc fin au bout de ces 6 morceaux, et la satisfaction affichée du trio valide assurément le succès de cette étape havraise. Même si ce concert de MONOLORD m'a donné moins d'effet que lorsque je les ai découvert au Ieperfest en 2015, le combo reste une valeur sûre. Rust est certes moins bon que ses prédécesseurs, mais le groupe tire tout de même son épingle du jeu avec un son massif en live.  

MONOLORD : Site web | Bandcamp | Facebook

Photographie d'Antonia Enos (Live For The Show) pour le CEM : Tumblr / Facebook



Un grand merci à Imaginoscope (Site web / Facebook) pour m'avoir autorisé à utiliser leur affiche, ainsi qu'à Antonia Enos du CEM (Live For The Show : Tumblr / Facebook) pour les photos !