Le passage à la capitale est finalement précédé d’une tournée européenne, dont le plateau est censé correspondre à celui des deux dates parisiennes. On a donc en guest la puissance brute de Pittsburgh CODE ORANGE, fraichement signé chez Roadrunner après être passé par Deathwish, ainsi que CAR BOMB, dont Joe Duplantier (chant/guitare dans GOJIRA) a enregistré le dernier album dans son Silver Cord Studio à New-York (source : Rock Hard #116). Sauf que finalement, les contraintes de l’Olympia imposent aux deux premières parties de se séparer sur le week-end. C’est donc CAR BOMB qui joue pour ce samedi 1er avril, CODE ORANGE assurant l’ouverture des hostilités le dimanche.
Outre cette annonce des plus décevantes (révélée le jour même sur la page Facebook de CODE ORANGE), ce live report contient un petit extra sur un produit qui a actuellement le vent en poupe : le meet & greet. En effet, à l’instar des États-Unis, Live Nation propose également en France différents packages VIP pour assister à tous ses concerts. De quoi avoir une petite idée de ce qui peut se cacher derrière tout ça.
Meet & Greet :
• 14h00 : Quelques fans attendent déjà au 28 boulevard des Capucines pour assister au premier Olympia de GOJIRA. Alors que certains sont là pour être aux premiers rangs lors du concert, d’autres patientent pour le meet & greet.
• 15h30 : La trentaine de personne qui participe à l'opération peut rentrer dans la mythique salle pour récupérer son badge VIP et le fameux texte qui a inspiré Terra Incognita (une vulgaire photocopie A4 en noir et blanc). La sécurité nous apprend qu’il n’est désormais plus possible de ressortir de la salle et fait du zèle avec les fans qui ont ramené des cadeaux pour les membres du groupe. On nous dit finalement qu’il faut patienter devant le bar du hall d’entrée, qui n'est même pas ouvert pour l’occasion.
• 16h10 : Alors qu’on entend le groupe balancer depuis déjà 40 minutes (notamment « Oroborus » et « Silvera »), on nous invite enfin à rentrer dans la salle, en nous rappelant qu’il est strictement interdit de prendre des photos ou des vidéos. Devant la foule qui s’avance, Joe s’étonne et balance « C’est le concert qui commence déjà ? ». Tout ce petit monde s’installe devant les barrières de sécurité et les membres de GOJIRA saluent les fans qu’ils reconnaissent. Le groupe joue « The Cell » et un deuxième morceau psychédélique (qui se révélera être un outro de « Pray »). Et ça sera finalement tout pour les balances.
• 16h20 : On attend une fois de plus devant le bar (toujours fermé) pendant que le groupe finit ses réglages (« Clone » ferait donc parti de la setlist ?).
• 16h45 : 25 minutes plus tard, Joe Duplantier, Mario Duplantier, Jean-Michel Labadie (basse) et Christian Andreu (guitare) viennent à notre rencontre. Dès lors, tout le monde passe un par un pour discuter avec eux, faire des autographes et leur offrir des cadeaux. Sauf que comme il y a du monde et que les portes de l’Olympia ouvrent à 17h30, le staff presse un peu le pas pour que ça enchaîne plus rapidement. Les musiciens, quant à eux, prennent clairement leur temps et jouent le jeu du meet & greet. Leur humilité et leur sympathie est indiscutable et ils semblent réellement touchés par la dévotion de leurs fans. Pendant que je fais signer l’intégral de leur discographie en vinyle, Joe me demande : « C’était bien le son, là ? Je pense que ça sera mieux quand y’aura du monde » alors que Jean-Michel balance « Merci à toi, c’est une belle collection que t’as là ». Et même s’il n’est normalement pas autorisé de prendre des photos individuelles, Mario encourage les fans à en prendre discrètement.
• 17h15 : Une fois que tout le monde est passé, le manager de GOJIRA prend la fameuse photo de groupe, puis les fans VIP ont accès au merch avant l’ouverture des portes. En principe, il semblerait que ça n’ait pas trop d’intérêt, sauf qu’il se trouve que des œuvres de Mario sont également à saisir, en particulier des canevas et des peaux de batterie à l’effigie de ce concert à l’Olympia. Les fans hardcore se sont donc allégé de plusieurs deniers sur ces pièces uniques, puis ont déposé leurs trophées au vestiaire avant de s’installer aux premiers rangs de la fosse.
• 17h15 : Une fois que tout le monde est passé, le manager de GOJIRA prend la fameuse photo de groupe, puis les fans VIP ont accès au merch avant l’ouverture des portes. En principe, il semblerait que ça n’ait pas trop d’intérêt, sauf qu’il se trouve que des œuvres de Mario sont également à saisir, en particulier des canevas et des peaux de batterie à l’effigie de ce concert à l’Olympia. Les fans hardcore se sont donc allégé de plusieurs deniers sur ces pièces uniques, puis ont déposé leurs trophées au vestiaire avant de s’installer aux premiers rangs de la fosse.
Exhibition de trophées
‡ CAR BOMB
Qu’on se le dise, CAR BOMB n’a pas du tout été convainquant pour ouvrir la soirée. Jouant quasiment dans le noir, les américains n’avaient pas du tout un son adapté à leur set, ce qui a donné un rendu massivement brouillon. Sur le style, on pense beaucoup aux très primaires Terra Incognita (2001) et The Link (2003) de GOJIRA, avec des plans déstructurés typés MESHUGGAH. « From The Dust of This Planet » (Meta, 2016) en est l’exemple, avec son outro semblable à celui de « Remembrance » (en plus chirurgical). Quelques plans plus schizophrènes font penser à THE DILLINGER ESCAPE PLAN, avec une voix qui alterne entre hurlements et chant clair (« Solid Grey » de Centralia sorti en 2007). Sur « Black Blood » (Meta), le combo tend plus vers le brutal death façon SUFFOCATION, et la guitare s’emballe sur quelques autres titres à la manière de NECROPHAGIST. Globalement, ça en fout un peu partout en piochant dans les différentes strates des musiques extrêmes, mais pas vraiment de la bonne manière. La reverb sur le chant est largement trop poussée et le jeu de batterie, difficile à appréhender, manque cruellement de souplesse. Michael Dafferner (chant) clôture les 40 minutes de set en remerciant allégrement Joe Duplantier pour l’enregistrement de Meta, et salue CODE ORANGE qui n’a pas pu jouer ce soir-là.
‡ GOJIRA
Les lumières s’éteignent et Mario arrive derrière les fûts, largement acclamé par la foule. Il lance le rythme d’intro du single « Only Pain » et 3 mesures plus tard, les cordes débarquent pour envoyer le riff principal du titre. Le son est puissant, et c’est parti pour 1h30 de show avec GOJIRA devant un Olympia qui lui est largement fidèle. L’enchaînement est sans appel avec « The Heaviest Matter Of The Universes », l’une des nombreuses bombes de From Mars To Sirius (2006). Impossible de ne pas hocher la tête sur un titre pareil tant la lourdeur des riffs et de la double pédale est impeccable. Dans un style beaucoup plus épuré, « Silvera » et « Stranded » prouvent l’efficacité live des titres de Magma, album beaucoup plus progressif que ses prédécesseurs. Le pont de « Silvera » fait d’ailleurs parti de ses petites douceurs dont seul GOJIRA a le secret, d’une intensité remarquable. Dans cette lignée, la palme de la soirée revient à « Flying Whales » de From Mars To Sirius : l’intro planante sur le doux chant des sirènes groove parfaitement et enchaîne sur le fameux riff d’appel absolument prenant. Un de ces titres cosmiques qui retourne les esgourdes tellement il est puissant et majestueux, à l’image de la pochette de l’album. L’outro est complétement dingue, avec un Jean-Michel qui donne des coups de basses dans tous les sens et qui saute sur l’estrade de Mario comme un dément. Sur l’ensemble du concert, on peut d’ailleurs remarquer qu’il prend d’autant plus son pied sur les anciens titres du combo. « The Cell » fait partie de ces nouveaux titres que GOJIRA défend en live, et même si ce n’est pas le meilleur de Magma, le morceau envoie plutôt bien en concert. Cependant, un « Low Land » ou un « Magma » aurait été plus appréciable. La grosse machine « Backbone » fait son effet, avec son tapis de double pédale et ses blast dévastateurs. Mais quid de l’épique « From The Sky » ? Fort heureusement, le petit cadeau en fin de titre ravive la flamme des premiers fans de GOJIRA : le groupe balance le break si emblématique de « Remembrance », direct au visage d’un public ravi. Après cette démonstration de force, la majestueuse piste cachée de Terra Incognita « Terra Inc. » fait voyager l’assemblée avec sa mélodie si entrainante et cette base rythmique groovy. Jean-Michel fait sonner ses cordes de manière absolument jouissive, comme il a toujours su le faire sur cet album (sa partie sur « Space Time » est des plus incroyables). « L’Enfant Sauvage » est cool, mais quitte à faire une seule piste de cet album sorti en 2012, autant jouer « Explosia » qui a tout même plus d’impact. Mario nous targue ensuite de son fameux solo de batterie, qu’il a finalement un peu épuré avec le temps. La meilleure performance live des morceaux de Magma reste l’opening ambiant « The Shooting Star », où des faisceaux verticaux de lumière créent une ambiance intimiste des plus propices. Une vraie réussite où la voix claire de Joe nous emporte par-delà les étoiles. Mais ce n’est finalement qu’un leurre pour nous en mettre ensuite plein la face avec le très direct « Toxic Garbage Island » (The Way Of All Flesh, 2008). L'excellent plan de double pédale mid tempo ne cessera d'ailleurs jamais d'évoquer le teaser de cet héritier tant attendu de From Mars To Sirius (à revoir ici). Le set principal se termine avec « Pray » (Magma), qui est agrémenté d’un outro massivement psychédélique et finalement un peu fouillis. En effet, il est assez difficile d’appréhender le plan d’un titre dont on connaît l’air lorsque le groupe s’amuse à l’étoffer dans tous les sens, sans jamais aller dans la direction connue. Mais cette envolée se conclue finalement avec le break d’outro du titre, et pour le coup, l’effet de surprise est massivement réussi.
Pour le rappel, Joe annonce la suite en déclarant : « Pour ceux qui ont rien entendu de pré-Magma, c’est un peu plus fou quand même ». Là, en plein dans la face d’un Olympia qui n’a pas fini de montrer ce qu’il a dans le ventre, GOJIRA balance l’excellent « Clone » de Terra Incognita. Même si le titre est joué un peu moins rapidement que sur l’album, c’est LA claque death incontestable de la soirée. Le titre est d’ailleurs disponible en version live (à Anvers en 2006) sur la réédition vinyle de l’album, mais cette fois en plus (voire trop) rapide. GOJIRA nous quitte finalement sur des morceaux de The Way Of All Flesh, avec le très bon « Oroborus » (ce tapping !) et le traditionnel « Vacuity » (ce blast !).
Pour son premier Olympia, GOJIRA a clairement assuré le show. Les jeux de lumière et l'écran derrière Mario donnent un réel cachet visuel et sont en adéquation parfaite avec les différentes ambiances que le groupe est capable de créer. Les morceaux live ne sont pas des pales copies des versions studio, mais sont au contraire toujours travaillées. On sent clairement que le groupe continue toujours de peaufiner ses moindres titres. Joe joue d'ailleurs beaucoup avec sa voix et n'hésite pas à faire des variantes en exploitant le nouveau panel de chant qu'il a développé.
La principale déception de la soirée reste l'absence de CODE ORANGE. Leur album Forever, sorti en février, est une vraie réussite hardcore noise qu'il me tarde de voir en live. D'autant plus que le groupe a dorénavant un guitariste supplémentaire.
Concernant le meet & greet, le bilan est en demi teinte. En soit, l'objectif a été atteint : voir le groupe balancer, rencontrer les membres et faire des dédicaces. Mais les contraintes liées à l'Olympia et le nombre de participant élevé ont fait perdre un peu de saveur à l'expérience. De fait, il est largement conseillé de le faire dans une salle en province : moins de monde + salle moins prestigieuse = plus de temps et de proximité avec le groupe.



