
18 mars 1997 : L'École Du Micro D'Argent sort dans les bacs et emmène IAM au sommet du panthéon du rap français. 15 décembre 2015 : Live Nation annonce un concert exceptionnel pour le 24 novembre 2017 afin de fêter les 20 ans de cet album d'anthologie. Rapidement sold out (même deux ans en avance), ce concert s'inscrit finalement dans une tournée anniversaire aux quatre coins des Zénith de France, avec un second AccorHotels Arena le 25 novembre. Après deux décennies, L'École Du Micro D'Argent n'a pas pris une seule ride, et il faudrait être fou pour rater une occasion pareille d'aller le voir en live.
En festival, IAM m'a déjà prouvé à maintes reprises qu'ils étaient toujours dans le game. Que ça soit aux Solidays en 2008 un an après la sortie de Saison 5, ou en 2013 au festival Art Sonic pour défendre Arts Martiens, l'énergie de Shurik'N et d'Akhenaton a constamment été au rendez-vous. Même si les titres les plus emblématiques de L'École Du Micro D'Argent ont toujours été mis à l'honneur dans leurs setlists, la constance de cet album fait qu'on n'en a finalement jamais assez. Un certain nombre de titres passent du coup régulièrement à la trappe, au profit des morceaux des derniers albums. La question qui persiste est donc la suivante : est-ce que l'album sera joué dans son intégralité ? Sur setlist.fm, rien n'était référencé avant le concert du 24 novembre. Sur Presse Océan, un article à propos de la date au Zénith de Nantes cite « Bad Boys De Marseille » et « Je Danse Le Mia ». Du coup, rien de vraiment palpitant comparé à la hauteur de l'évènement mais surtout, rien à propos d'éventuels featuring dont est bardé l'album (genre au pif : « La Saga »). Alors au final, qu'est-ce qu'il en est ? En 2h30 de show, IAM a bien tenu toutes ses promesses en jouant L'École Du Micro D'Argent dans sa quasi-totalité (seul « Regarde » est resté sur le banc de touche) et en conviant un certain nombre d'invités inespérés, voire inattendus.
La soirée débute avec le groupe marseillais CARPE DIEM. Existant depuis les années 2000, ce groupe de rap est relativement inconnu au bataillon et ce n'est finalement pas si étonnant. Le sextet (5 vocalistes + 1 beatmaker) ambiance timidement un AccorHotels Arena à moitié vide à 20h. A part un titre sur la thématique du foot qui semble ultra référencé et qui pourrait ravir les aficionados du sport le plus populaire du monde, il n'y a finalement pas grand chose à retenir de mon côté. Leur dernier morceau 100 % street cred « Tranquille Ou Quoi » (2017) parle de lui-même.
‡ IAM
Un orchestre de percussions s’installe devant le rideau de la scène pour chauffer une assemblée qui brûle d’impatience. Le martèlement des tambours évoque d’ores et déjà le pays du soleil levant et déclenche de fait l’immersion dans l’univers des Imperial Asiatic Men. Le ton est donné, et malgré une transition quelque peu à l’arraché (les roadies déboulent en avance pour ranger le matos des percussionnistes), le rideau tombe enfin pour révéler le décor qui va nous éblouir pendant près de 2h30. Un écran géant à l’image de l’album bidécennal, trois pupitres dotés d’écrans pour les DJ, des racks en forme de temple asiatique et des bannières à l’effigie des membres d’IAM. La vidéo d’intro (une version longue du trailer de la tournée) provoque les instincts guerriers de tous les valeureux soldats qui bouillonnent dans l’AccorHotels Arena. Les 3 DJ prennent place derrière leurs platines, l’instru est en suspens, la tension est palpable…
« Assis en tailleur, voilà des heures que je médite » : dans un tonnerre de hurlements, Shurk’N déboule dans la place avec Saïd pour balancer son incroyable couplet d’ouverture sur « L’École Du Micro D’Argent ». Plus légère que sur la production d’origine, l’instru donne tout de même l’occasion au public d’amorcer sa session karaoké du soir. Après un refrain où l’assemblée s’époumone, elle est une fois de plus laissée en suspension pour accueillir les derniers généraux de l’armée. « Mon sabre scintille, je médite, accroupi sous les branches d’un saule, pleure, je défends l’honneur de mon école, fils ! » : c’est au tour d’Akhenaton, accompagné de Kephren, de débarquer sur les planches et de provoquer une nouvelle frénésie dans la salle. Cachés derrière des masques de proto samouraï (voir les Immortels dans le film 300), les deux MCs et leurs choristes déroulent la puissance de leur art martien et occupent tout l’espace. Réelle métaphore filée du rap game sur la culture guerrière de l’extrême Orient, « L’École Du Micro D’Argent » est un déluge de virtuosité qui pose les fondations de la thématique la plus emblématique du combo marseillais.
Sans crier gare, IAM enchaîne avec le diptyque intemporel « Nés Sous La Même Étoile », dont la punchline de Maître Shu « Certains naissent dans les choux, d’autres dans la merde » résume le propos du titre. Son frère FAF LA RAGE est le premier invité de la soirée pour « La Garde Meurt Mais Ne Se Rend Pas », morceau issu de leur album collaboratif La Garde sorti en 2000. Les Marseillais rendent ensuite un fervent hommage à la cité phocéenne avec « Marseille La Nuit » (disponible sur la version collector de L'École Du Micro D'Argent) et « Notre Dame Veille » (seul titre du très bon Arts Martiens sorti en 2013). Parmi les grands classiques live de la carrière solo de Shurik’N, « Samouraï » (de son premier premier album Où Je Vis sorti en 1998) fait son petit effet avec ses « dernier Samouraï ! » repris sans difficulté aucune par l'ex-Bercy. C’est au tour d’Akhenaton de prendre les devants sur un medley plus urbain composé de « Poudre De Brique Rouge » (…IAM, 2013) et de « La Face B » (issu de son premier album Métèque Et Mat sorti en 1995). Le final de cette session n’est autre que l’incroyable « Chez Le Mac », qui met habilement en parallèle l’art de manier le verbe avec la gestion d’un réseau de travailleuses du soir. En guest, Prince Charles Alexander, producteur de L’École Du Micro D’Argent, accompagne le groupe à la flûte traversière, accentuant l’ambiance mafieuse du titre : « Ça s’passe comme ça, chez le mac ».
« Monnaie De Singe » est le premier titre du soir issu de Rêvolution, la dernière production du combo sorti en début d’année. Une occasion non manquée d’arroser la foule avec des canons à billets. Le second medley nous plonge dans une ambiance far west, largement initiée par l’album Sad Hill produit par DJ Kheops en 1997 et dans lequel figurent des artistes comme IAM, X-MEN et OXMO PUCCINO. Sentenza (AKH) et Jo L’Indien (Shurik’N) nous balancent donc « Sad Hill » et « Pousse Au Milieu Des Cactus, Ma Rancœur », pour bien évidemment clôturer l’intermède eastwoodien avec le très bon « Un Bon Son Brut Pour Les Truands ». Comme le souligne Akhenaton, le hip-hop a des titres où il faut aller au-delà de la musique et écouter les textes. Shurik’N s’installe donc sur un tabouret pour nous livrer son très poignant « La Lettre » (Où Je Vis) : une belle claque pour les ignorants de ce son (dont je fais partie). Akhenaton explique à l’AccorHotels Arena que pendant l’enregistrement de L’École Du Micro D’Argent, Imhotep était parti un matin pour acheter des vinyles et était finalement revenu avec ce qui a donné… « La Saga » ! L’instru démarre et les guests tant attendus sont bien là : Prodigal Sunn de SUNZ OF MAN et Dreddy Krueger de ROYAL FAM envoient leurs phases sur cette collaboration légendaire et c’est tout New York City qui s’infiltre dans la salle parisienne. Malgré l’absence de Timbo King (ROYAL FAM), les deux membres du crew WU-TANG CLAN présents ce soir donnent un intérêt certain à ce concert anniversaire. On aurait pu pousser le caractère évènementiel avec un petit « Noble Art » (Revoir Un Printemps, 2003) en featuring avec Method Man et Redman (WU-TANG CLAN), mais on ne va pas non plus réclamer le beurre et l’argent du beurre.
Sans crier gare, IAM enchaîne avec le diptyque intemporel « Nés Sous La Même Étoile », dont la punchline de Maître Shu « Certains naissent dans les choux, d’autres dans la merde » résume le propos du titre. Son frère FAF LA RAGE est le premier invité de la soirée pour « La Garde Meurt Mais Ne Se Rend Pas », morceau issu de leur album collaboratif La Garde sorti en 2000. Les Marseillais rendent ensuite un fervent hommage à la cité phocéenne avec « Marseille La Nuit » (disponible sur la version collector de L'École Du Micro D'Argent) et « Notre Dame Veille » (seul titre du très bon Arts Martiens sorti en 2013). Parmi les grands classiques live de la carrière solo de Shurik’N, « Samouraï » (de son premier premier album Où Je Vis sorti en 1998) fait son petit effet avec ses « dernier Samouraï ! » repris sans difficulté aucune par l'ex-Bercy. C’est au tour d’Akhenaton de prendre les devants sur un medley plus urbain composé de « Poudre De Brique Rouge » (…IAM, 2013) et de « La Face B » (issu de son premier album Métèque Et Mat sorti en 1995). Le final de cette session n’est autre que l’incroyable « Chez Le Mac », qui met habilement en parallèle l’art de manier le verbe avec la gestion d’un réseau de travailleuses du soir. En guest, Prince Charles Alexander, producteur de L’École Du Micro D’Argent, accompagne le groupe à la flûte traversière, accentuant l’ambiance mafieuse du titre : « Ça s’passe comme ça, chez le mac ».
« Monnaie De Singe » est le premier titre du soir issu de Rêvolution, la dernière production du combo sorti en début d’année. Une occasion non manquée d’arroser la foule avec des canons à billets. Le second medley nous plonge dans une ambiance far west, largement initiée par l’album Sad Hill produit par DJ Kheops en 1997 et dans lequel figurent des artistes comme IAM, X-MEN et OXMO PUCCINO. Sentenza (AKH) et Jo L’Indien (Shurik’N) nous balancent donc « Sad Hill » et « Pousse Au Milieu Des Cactus, Ma Rancœur », pour bien évidemment clôturer l’intermède eastwoodien avec le très bon « Un Bon Son Brut Pour Les Truands ». Comme le souligne Akhenaton, le hip-hop a des titres où il faut aller au-delà de la musique et écouter les textes. Shurik’N s’installe donc sur un tabouret pour nous livrer son très poignant « La Lettre » (Où Je Vis) : une belle claque pour les ignorants de ce son (dont je fais partie). Akhenaton explique à l’AccorHotels Arena que pendant l’enregistrement de L’École Du Micro D’Argent, Imhotep était parti un matin pour acheter des vinyles et était finalement revenu avec ce qui a donné… « La Saga » ! L’instru démarre et les guests tant attendus sont bien là : Prodigal Sunn de SUNZ OF MAN et Dreddy Krueger de ROYAL FAM envoient leurs phases sur cette collaboration légendaire et c’est tout New York City qui s’infiltre dans la salle parisienne. Malgré l’absence de Timbo King (ROYAL FAM), les deux membres du crew WU-TANG CLAN présents ce soir donnent un intérêt certain à ce concert anniversaire. On aurait pu pousser le caractère évènementiel avec un petit « Noble Art » (Revoir Un Printemps, 2003) en featuring avec Method Man et Redman (WU-TANG CLAN), mais on ne va pas non plus réclamer le beurre et l’argent du beurre.
L'aventure avec les cascadeuses en Wonderbra peu scrupuleuses nous est bien conté ce soir et « Elle Donne Son Corps Avant Son Nom » relance quelque peu la session karaoké. Ce story telling, non dénué d’un certain humour, a un refrain clairement acquis par le public, sans oublier le sample « Plus de chèque, plus de carte, plus de liquide ! » qui est repris à l’unanimité. Selon Akhenaton, et à juste titre, le hip-hop ne serait rien sans ses DJ. Le « petit frère » (dixit AKH) DJ Daz balance donc un mix pour ambiancer quelque minutes le public de l’Arena. Outre la lourdeur du beat et un « Belsunce Breakdown » de BOUGA savamment scratché, la performance n’est pas extraordinaire. La faute probablement à un « Ce Soir On Vous Met » à la limite de la beauferie. Parmi ses classiques live, IAM enchaîne avec le très festif « Independenza » et met bien évidemment Paris en bordel. La seconde pépite qui donne haut la main de la force à cette prestation est l’exceptionnelle piste 9 de l’album mis à l’honneur sur cette tournée : « L’Enfer ». Des flammes inondent les écrans géants et le portrait de East, décédé en 1996 des suites d’un accident de scooter, s’affiche au centre de la scène (le morceau lui est ouvertement dédié). Fabe n’est pas là non plus, celui-ci ayant arrêté sa carrière musicale dans les années 2000 pour se consacrer à l’islam (dixit Wikipédia). Même si les meilleurs couplets du titre reviennent incontestablement aux deux grands absents, c’est un réel privilège de pouvoir voir en live ne serait-ce qu’une version réduite de ce morceau d’anthologie. La phase de Shurik'N reste d'ailleurs exceptionnelle : « La vie est un film où tout le monde a un rôle à jouer, le problème c'est qu'il y a trop de série B, trop de seconds rôles croulant sous le poids du premier ».
Après le très contestataire (mais pour le moins dispensable) « Dangereux », IAM revient avec des sapes old school pour envoyer un second titre de Rêvolution. « Orthodoxes » se révèle être une bonne découverte qui encourage fortement à jeter une oreille sur la dernière production des Marseillais. Le dernier featuring improbable du soir issu de L’École Du Mirco D’Argent est la collaboration avec NUTTEA sur le très bon « Un Cri Court Dans La Nuit ». Le timbre de voix mélancolique de l’artiste donne tout son charme au refrain pour le moins sinistre de ce titre, provoquant un résultat du plus bel effet. Pour le morceau grand public le plus célèbre du groupe, une énorme boule à facettes disco prend place au beau milieu de l’ex-POPB, avec comme invité MOFAK et son setup talkbox/clavier. Les premières notes du sample de « Give Me The Night » (GEORGE BENSON) provoquent cet irrésistible automatisme dans les jambes et animent instantanément les 20 000 spectateurs : c’est bien le tube « Je Danse Le Mia » (Ombre Et Lumière, 1993) qui va nous faire danser. Incroyablement funky et groovy en live, la participation du Marseillais MOFAK donne du cachet supplémentaire au morceau en ajoutant un effet DAFT PUNK façon Discovery (2001). Celui-ci vole même la vedette à Saïd dont le traditionnel couplet soul se retrouve fortement réduit. Pour finir son set principal, IAM balance « Petit Frère » sur une production ultra massive tout en diffusant le clip du titre. Inutile de douter une seconde de l’impact du morceau : la portée intemporelle du sujet et les phases incroyables de Shurik’N et d’AKH font l’effet d’une bombe sur l’Arena. « Il vient à peine de sortir de son œuf, et déjà petit frère, veut être plus gros que le bœuf » (Shurik'N).
Le rappel se lance sur une vidéo cosmique qui ne laisse aucun doute sur la suite des événements. Des croiseurs impériaux, une histoire de jedi, les deux choristes qui déboulent avec des doubles sabres laser rouge. Shurik’N balance un petit « Hé oui, on les a ramené ! » malicieux et c’est avec une production archi lourde qu’on se prend « L’Empire Du Côté Obscur » dans les dents.
Photographie de Jérémy Magnier
Photographie de Jérémy Magnier
Ça enchaine avec un autre classique d’Akhenaton de Métèque Et Mat, le fameux « Bad Boy De Marseille ». Pas de membres de la FONKY FAMILY à l’horizon, mais le résultat est là. Il aurait était impensable qu’IAM fête le vingtième anniversaire de L’École Du Micro D’Argent sans nous livrer l’excellent « Quand Tu Allais, On Revenait ». S’inscrivant indubitablement dans le thème de ce quasi concept-album, le morceau est joué avec une production beaucoup plus lounge qu’en studio. Les vocalistes font participer le public en le faisant s’assoir sur chacun des refrains, et même si le titre a moins d’impact que sur le CD, le son est tellement bon que ça passe crème. Le line-up d’IAM ayant changé depuis 1997, Shurik’N a depuis habilement changé les paroles du premier couplet pour l’adapter en live : « Ils ont dit aussi, et la faute se profile, que cinq moins s’échappèrent, faux, on était [sept] » (ils étaient six à l’époque de l’enregistrement). Quoiqu’il en soit, les « chevaliers de la basse ronde » se dressent bien devant nous et s’apprêtent finalement à envoyer le fameux morceau classé n°1 au Top 100 des Classiques du Rap Français selon l’Abcdr Du Son (qu’il est fortement conseillé de consulter pour la qualité irréprochable). AKH : « 20 ans après, la monnaie change, les marques de voiture aussi, mais au fond rien n’a changé ». Les membres s’installent comme à l’accoutumée sur un banc des villes posé au milieu de la scène, et c’est parti pour 10 minutes de pur rap dénonciateur avec « Demain, C’Est Loin ». L’unicité des phrasés de Shurik’N et d’AKH n’ont d’égal que la portée du titre qui, malheureusement, traversera sans difficulté aucune une décennie de plus. Comme d'habitude, cette dernière piste de L’École Du Micro D’Argent clôture le set des Imperial Asiatic Men. IAM salue chaleureusement son public et Akhenaton souligne avec reconnaissance : « On sait que la plupart des gens qui sont ici ont pris leur place il y a 2 ans, et pour ça merci ! ». La bataille est finie, les rangs se disséminent, et la victoire revient incontestablement aux vaillants praticiens des arts martiens.
IAM ne s'est donc clairement pas foutu de son public avec ce concert anniversaire. On pourrait regretter l'absence de quelques titres d'Arts Martiens tels que « Spartiate Spirit » et « Benkei Et Minamoto », qui s'inscrivent parfaitement dans les thématiques de la Chine antique, mais ça serait pousser la critique un peu loin. Dans tous les cas, le contrat a clairement été honoré, et il sera réellement difficile de faire descendre de son piédestal cet incroyable album qu'est L'École Du Micro D'Argent.
Un grand merci à Jérémy Magnier pour m'avoir passé quelques unes de ses photos !
Un grand merci à Jérémy Magnier pour m'avoir passé quelques unes de ses photos !


